M.Chat passe des murs aux toiles

Artiste de street-art reconnu depuis 20 ans grâce à son célèbre M. Chat et depuis peu peintre sur toile, Thoma Vuille était à l’honneur dans la Ville rose au printemps 2017.

L’occasion de brosser le portrait (dans le bon sens du poil) d’un artiste un peu « perché ».

Vous connaissez forcément la silhouette cartoonesque de M. Chat, ce bon gros matou jaune-orangé au sourire figé, qui se fait les griffes sur les murs du monde entier. Il était à l’affiche du Muséum de Toulouse jusqu’en juillet, à travers des œuvres originales proposées dans le cadre de l’exposition « Chiens et Chats ».

Ce fameux félin, reconnaissable entre tous, est né en 1997, à Orléans, alors que Thoma Vuille assurait des cours d’animation périscolaire dans une école primaire. « J’ai repris le dessin d’une petite fille pakistanaise qui m’a ému, se remémore-t-il, et j’ai décidé de retranscrire cette émotion. » Depuis, on ne compte plus le nombre de reproduction de ce chat psychédélique qui a fait le tour du monde.

Combien l’artiste urbain en a t’il caché dans les rues ? « Depuis que j’ai dépassé les 300, je ne les compte plus… Dès que je trouvais un endroit accueillant, j’y déposais mon chat. Ma chance, c’est qu’ils sont restés. J’ai réussi à trouver des niches où ils ont été conservés alors que le graffiti est par essence éphémère. »

De la couleur sur les murs

Le street-art a beaucoup évolué et est désormais reconnu comme un art urbain à part entière. Au départ, la « culture graffiti » était surtout vécue comme une agression mais pour Thoma Vuille, « pour peindre dans la rue, il ne faut pas forcément une raison particulière, cela peut juste être une question d’envie. Avoir envie d’intervenir sur son espace, pour mettre de la couleur sur les murs sales. C’est une façon de s’approprier son environnement, estime-t-il, de ne pas le subir ou en être victime mais plutôt d’en être acteur. Cela permet de donner envie de participer et non pas de casser ; graffer c’est rajouter pour embellir, en apportant une amélioration. »

Cette pratique lui a pourtant valu quelques démêlés avec la justice pour avoir niché son inoffensif M. Chat dans des endroits interdits…

À ses débuts, en tant que « graffeur provincial » comme il se définit, l’artiste a souhaité suivre la mode du graffiti. « Pour moi, l’art c’était les graffitis, les fresques et la peinture sur les murs… » Le jeune homme, passé par les Beaux-Arts d’Orléans après un Bac en génie civil, est issu d’une famille franco-suisse qui a toujours entretenu des liens avec la peinture. Avec un grand-père peintre plâtrier et une grand-mère peintre impressionniste, « on a toujours peint sur les murs dans ma famille », reconnait-il. Quand il est arrivé dans ce milieu, il a pensé se démarquer en s’appropriant ce chat plutôt bienveillant et aux dents très blanches.

Une inspiration toulousaine

Sa technique est simple : un dessin minimaliste, aux formes géométriques très basiques. De l’art naïf, typique de la peinture des arts de la rue. « J’ai repris une idée existante simple mais qui fait toujours grand défaut aujourd’hui : la joie et la bonne humeur. »

Dès les débuts de M. Chat, il choisit de ne pas utiliser de bombe de peinture mais de l’acrylique. « Dans mes pérégrinations, j’étais passé avant 1997 par Toulouse et j’ai été fasciné par « l’école toulousaine » composée de Van, Fafi, Kat et Plume. Elles utilisaient de la peinture acrylique. C’est beaucoup moins intrusif et le fait d’avoir une technique plus lente oblige à la sociabilisation avec les passants. »

Sur les toiles

Entre 2000 et 2003, l’artiste voyage et graffe dans les rues de Paris, de 2004 à 2007 il ouvre une galerie avec d’autres graffeurs. Depuis 2007, il vit de son art grâce son chat : festival organisé à Orléans, expos dans des musées et dans des galeries privées… Il est désormais représenté par Brugier-Rigail, la galerie parisienne qui a organisé l’exposition installée à Toulouse jusqu’au 2 juillet. « Maintenant, je ne paye plus pour peindre dans la rue (NDLR : avec des amendes), s’amuse-t-il ; mais je peins et on me paye pour ça ! »

Car récemment, l’artiste s’est mis à la peinture sur toile. Depuis l’automne 2016, Thoma Vuille peint en effet des tableaux. Sur ses toiles, il utilise plusieurs techniques de rue : bombage, pochoirs… pour un rendu baroque ou décoratif.

Sa première œuvre picturale, allégorique et nommée « Le chevalier sans tête », il l’a réalisée en un jour. Son second tableau, « La Justice et la Vengeance divine poursuivant M. Chat, d’après P-P Prud’hon », se rapproche, lui, d’une fresque historique. L’inspiration du peintre est toute personnelle : « Mes échecs et mes expériences nourrissent mes tableaux.»

Dans son travail, deux styles de tableaux se détachent : « Ceux où je retrace l’histoire du chat, avec ce qui est resté dans l’impression collective, ce dont les gens se souviennent ; et d’autres qui sont liés à mes petits malheurs. » Une façon de se mettre un peu à nu sous les coups de pinceaux et d’aérosols. Pourtant, l’artiste se cache encore souvent derrière son masque… de chat ! « Ce n’est pas moi qui suis connu, c’est mon chat ! »

 

Photos : © Christian Nitard © Mélanie Moncassin

 

 

 

 

Commentaires

Une Réponse à “M.Chat passe des murs aux toiles”

×