La villa Goxodi Eder, entre charme d’antan et modernité

Comme reliant le dynamisme urbain aux embruns de la grande bleue, entre ville et nature, la Villa Goxoki Eder semble avoir fait le pari de l’entre-deux, de l’harmonieuse alliance des contraires.

À commencer par sa situation privilégiée puisque cette demeure néo-basque construite en 1917 se situe à seulement quelques mètres du centre historique d’Hendaye, tandis qu’une promenade piétonnière conduit les randonneurs en quête de grand air jusqu’à la plage et la baie de Txingudi. Dans ce cadre idyllique, propriétaires et locataires saisonniers se partagent les lieux et bénéficient de récents travaux de réaménagement et de décoration faisant la part belle à la cohabitation des styles, avec pour devise le respect de l’âme des lieux et l’intégration de la modernité au charme existant.

Un jardin de ville aux airs d’Eden tropical... © photos : Benoît Mauduech
Un jardin de ville aux airs d’Eden tropical… © photos : Benoît Mauduech

Un espace professionnel…

Achetée en 1982 lors de l’installation des propriétaires à Hendaye, la villa fait rapidement valoir son charme basque alors encore traditionnel et séduit le couple par son caractère : beaux volumes, hauts plafonds, colombages, parquets… Rapidement, les propriétaires allient l’utile à l’agréable et transforment le rez-de-jardin en cabinet médical pour leurs activités professionnelles ; les deux niveaux supérieurs étant, quant à eux, consacrés à leur résidence personnelle. Débute alors une première étape de travaux et de modernisation avec l’apparition au premier étage de deux terrasses de part et d’autre de la façade principale, constituant le lieu de vie estival. L’architecte Pierre Couteau intervient pour le gros œuvre et divers travaux d’aménagements intérieurs. La cage d’escalier menant aux étages se mue notamment en verrière, de grands panneaux de plexiglas remplaçant alors la rampe d’origine.

 … transformé en appartement indépendant

Comme le dit le vieil adage, rien n’est immuable. Ainsi, les projets se suivent et ne se ressemblent pas puisqu’aujourd’hui, l’ancien cabinet médical est en effet devenu un appartement en location. Les propriétaires ont souhaité investir des locaux professionnels plus vastes, en dehors du domicile familial, et redonner un second souffle à cet espace. L’idée principale : conserver le charme originel de la demeure. Ils rencontrent alors Marie-Ange Lazartigue, décoratrice d’intérieur disposant d’un show-room à Biarritz, qui leur apporte son regard averti et son acuité en termes de choix des teintes et des tissus d’ameublement. L’appartement s’ouvre sur l’extérieur par de grandes baies vitrées et offre directement accès au jardin privatif. Les teintes pastel rose poudré des murs et du plafond inspirent le calme et la douceur. Les tissus d’ameublement de la créatrice Dominique Kieffer s’inscrivent eux aussi dans des gammes chromatiques délicates et nuancées. Les rideaux en toile de parachute, déclinés dans plusieurs coloris, ajoutent un caractère fluide, aérien et fonctionnel à l’ensemble.

Côté résidence privée, objets ethniques et créations design cohabitent avec goût. © photos : Benoît Mauduech
Côté résidence privée, objets ethniques et créations design cohabitent avec goût. © photos : Benoît Mauduech

Le jeu des décalages

Le lieu, présentant parfois des allures éclectiques, associe les éléments anciens à des notes modernes. Le mélange des styles crée une certaine harmonie ludique qui évolue au gré des coups de cœur du couple.

Le carrelage rectangulaire blanc au sol, de style année 70, est conservé dans toutes les pièces de l’appartement du rez-de-jardin à la demande de la maîtresse des lieux, tandis qu’un carrelage noir métro plutôt contemporain, suggéré par la décoratrice d’intérieur, tapisse le coin douche pour s’accorder au duo noir et blanc du mobilier design de la salle de bains. Côté décoration, le mobilier vintage flirte avec des éléments d’ameublement et d’ornement plus modernes ou de style « bobo ».

Pour accueillir les locataires, la salle de bains joue la note d’une bichromie intemporelle… © photos : Benoît Mauduech
Pour accueillir les locataires, la salle de bains joue la note d’une bichromie intemporelle… © photos : Benoît Mauduech

Deux fauteuils de type Le Corbusier trônent aux côtés d’un fauteuil Airborne, dit ‘Butterfly’, et d’un lampadaire Arco dominant le coin repas. Ce dernier est constitué d’une table et d’un banc en bois plus rustiques pour une ambiance subitement champêtre.

Dans la cuisine, le gris métallisé ambiant est volontairement associé à une table en formica rouge, clin d’œil aux années 50 ; et ce, toujours dans ce désir assumé d’échapper aux codes de la coordination.

Certaines statuettes de style rococo installent l’originalité et l’humour au programme des étages supérieurs… © photos : Benoît Mauduech
Certaines statuettes de style rococo installent l’originalité et l’humour au programme des étages supérieurs… © photos : Benoît Mauduech

Côté résidence privée

Dans l’espace de vie des propriétaires, le mélange des genres se retrouve encore. Le traitement des couleurs, les tissus d’ameublement et les éléments décoratifs ont reçu une attention particulière. En effet, bibelots, tableaux et tapis jouent la carte de l’originalité dans un cadre hétéroclite : statuette et horloge dorées, de style rococo, cohabitent avec des objets ethniques provenant de nombreux voyages effectués, comme un tapis berbère aux couleurs Harlequin, des masques africains, des tableaux célébrant l’Espagne et des souvenirs de Birmanie ou du Guatemala. De multiples créations trônent aussi ici et là, telles qu’une chaise longue Le Corbusier, une table basse en verre signée Noguchi ou encore un fauteuil créé par Alfredo Häberli.

Dans la suite parentale, la décoratrice d’intérieur a su convaincre avec un choix osé. À partir d’un papier peint de la marque Elitis, de tendance ethnique et aux couleurs vives, Marie-Ange Lazartigue a totalement repensé la pièce. Seul un pan de mur est tapissé ; le reste de la chambre est peint dans une teinte saturée, riche en pigments, à mi-chemin entre le vert et le bleu. L’association apaise l’atmosphère par sa profondeur. La chaise moderne à bascule, la cheminée en marbre et les doubles rideaux en lin sauvage du créateur italien Larsen apportent une touche de sobriété à l’ensemble.

Dans la salle de bains, le carrelage vintage blanc cassé de la gamme « Déchirer », signé par la célèbre designer Patricia Urquiola, joue la note du romantisme avec son imprimé de dentelle, comme autant de motifs en relief apposés aux murs et au sol. La propriétaire a ajouté une touche personnelle et affective : l’ancienne coiffeuse de sa grand-mère est mise en valeur par la pureté du blanc environnant.

La cuisine du rez-de-chaussée locatif associe modernité et clins d’œil aux années 50. © photos : Benoît Mauduech
La cuisine du rez-de-chaussée locatif associe modernité et clins d’œil aux années 50. © photos : Benoît Mauduech

Un jardin de ville venu d’ailleurs

L’appel au grand air et au voyage, la villa Goxoki Eder le revendique dès son seuil franchi. En effet, les maîtres des lieux ont créé une véritable oasis de fraîcheur dans le petit jardin de ville réaménagé par un paysagiste. Palmiers, rosiers grimpants, fougères arborescentes, hortensias, magnolias, lauriers roses, bananiers à foison donnent à cet espace vert intimiste des airs de jardin d’Eden tropical. La propriétaire, passionnée de décoration, dit d’ailleurs s’être inspirée de celui du célèbre écrivain Pierre Loti, épris d’exotisme.

Par Salwa Fejry-Vernier

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