Dans le cabinet visuel de Sarah Zubic

Sarah Zubic, peintre en décor, nous accueille dans son atelier de Mauzac (31).

Elle est peintre en décor et a lancé sa première collection originale de papier peint d’atelier, créé à la main. Rencontre avec Sarah Zubic dans son atelier, le Cabinet visuel, à Mauzac (31).

Comment êtes-vous devenue peintre en décor ?

J’ai commencé par travailler avec des associations toulousaines pour le décor. Mon point faible était la peinture alors je me suis formée à l’Infa (Institut National de Formation et d’Application) en 2013 et à ce moment-là, la peinture a été comme une révélation !

Vous nous expliquez cette révélation ?

Après quelques demandes de clients très classiques comme du marbre ou des colonnes de marbre, ou encore des jardins zen, ces sujets ne me faisaient pas vibrer et je me suis rendue compte que je n’avais plus envie de les réaliser, mais plutôt de développer ce qui me plaît. Je voulais faire quelque chose qui me ressemble et que j’avais envie de voir.

Quelles envies justement ?

Les couleurs, la lumière et la qualité du toucher. Je crois que les couleurs m’ont toujours poursuivie dans mon travail – cela me vient d’ailleurs peut-être de ma mère qui est elle aussi artiste – et toutes ces matières que je travaille, avec les patines, viennent de l’observation de ce qu’il se passe autour de nous.

C’est ce qui compose votre source d’inspiration ?

C’est tout à fait cela, quand je bouge, je regarde des choses que les gens ne voient pas forcément : de la mousse qui pousse sur les écorces des arbres, un outil bleu piqué d’une rouille fascinante… Les couleurs du temps et de la nature me touchent particulièrement. Ce sont des ambiances qui m’inspirent, j’ouvre les yeux et tout cela me guide.

Pourquoi les transposer sur du papier ?

Cela a un sens pour moi de travailler le support papier en le faisant à la main, dans l’univers de l’atelier. À la base, c’est du papier qui est peint, même s’il peut être reproduit en impression ensuite. La peinture est scannée pour conserver l’effet du grain. 

Le papier peint est à la mode en ce moment mais le problème de cette tendance, c’est que très peu sont peints, beaucoup sont des photos agrandies. Moi je m’attache à partir du travail de peinture en atelier, avec la recherche des graphismes et des couleurs, ce n’est pas du travail d’ordinateur.

Vous avez créé votre propre marque ?

La Cabinet visuel était dans ma tête depuis longtemps et a été lancé en 2016. Avec un nom faisant écho au cabinet de curiosités, pour donner à voir une multitude de choses, à travers des tiroirs à ouvrir remplis d’une variété de propositions. Mais toujours avec ce fil conducteur, ma patte à moi, le travail de la matière et des couleurs allié à un graphisme. Il y a une vraie histoire entre mes peintures et moi.

Vous avez ensuite lancé votre première collection de papier peint ?

Je l’ai appelée « Les graphiks » et elle est sortie mi-2017 : c’est une série limitée imprimée de dix numéros, avec 14 modèles. Elle est très graphique, avec des lignes, des ponts et beaucoup de moucharabieh (NDLR : panneaux ajourés de bois) qui permettent de jouer avec l’ombre et la lumière. Ces motifs sont imprimés sur des rouleaux de 1,20 par 3 mètres. 

Comment élaborez-vous vos motifs ?

Je commence par les graphismes. Je gribouille sur du papier, je m’inspire de photos faites en voyage en Inde, en Turquie ou ailleurs, du monde extérieur… Je travaille beaucoup sur papier et après je me lance sur la découpe de pochoirs à la main pour voir ce que cela donne. L’irrégularité de la découpe donne la vibrance du décor à la fin, il vit et n’est pas forcément symétrique. Je suis toujours pressée de tester et à ce moment-là je choisis mes couleurs ; ce n’est pas moi qui décide, elles s’imposent toutes seules.

Vous en utilisez combien ?

Je pars toujours sur une association de couleurs contrastées, au moins deux, voire trois, mais ce qui va les faire se marier, c’est la patine, après une dizaine de passes au moins. Cela donne une transparence à la peinture et les deux s’entremêlent, malgré le contraste initial. J’aime ce qui se contraste et qui pourrait, pour d’autres, se contredire mais qui en se travaillant se fond dans mon décor.

Quels matériaux travaillez-vous ?

Du « papier rénovation », de la peinture acrylique contenant très peu de solvants et le moins possible de COV (composés organiques volatils), et la patine composée de pigments naturels fixés avec un liant classique à l’eau. Quand je travaille la matière, je fais des enlevés, je pose puis j’enlève des couches de pigments avec une éponge de mer.

C’est du papier peint exclusivement pour les murs ?

On peut le poser absolument sur tout ! Des murs comme des meubles, mais avec une bonne préparation. Je peux d’ailleurs assurer la pose chez les clients. Je peux aussi créer sur place un décor avec des motifs sur-mesure, à la demande, avec de la création pure.

Vous préparez déjà une seconde collection ?

Pour ma seconde collection, prévue pour septembre 2018, je voudrais proposer seulement de l’unique. Je la prépare avec de la linogravure, une vieille technique de gravure sur un matériel particulier (liège, résine, huile de lin, sur de la toile de jute compressée). Moi, j’utilise de la gomme, qui me sert de tampon que j’applique pour faire des motifs. C’est comme une empreinte, cela donne un effet encore différent du pochoir. Et je vais utiliser du noir. C’est osé et discret, les autres couleurs éclatent à ses côtés.

www.sarahzubic.com

Photos : Sarah Zubic et Kevin Miana

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